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Les fondements de la tripartition sociale chez Adalbéron de Laon

Published online by Cambridge University Press:  25 May 2018

Claude Carozzi*
Affiliation:
Université de Provence

Extract

Le Poème au roi Robert d'Adalbéron de Laon, est surtout connu pour l'exposé qu'il contient de la tripartition sociale. Cette théorie, issue de la vieille idéologie indo-européenne, trouve là son expression la plus complète en Occident. Ce n'est pas un hasard si elle apparaît ainsi, sous cette forme très élaborée, entre 1027 et 1030. Les travaux de Jean-François Lemarignier ont clairement démontré que cette époque marque un tournant dans la conception du pouvoir royal. Par bien des aspects, le Carmen en est une des expressions littéraires. A partir du vieux thème d'origine païenne, Adalbéron construit une théorie chrétienne de l'ordre social dont le pivot est une conception qui se veut traditionnelle de la royauté. C'est l'urgence de ce qu'il interprète comme une crise qui le pousse à tenter la fusion de ces deux éléments hétérogènes : une expression païenne de la souveraineté et une tradition chrétienne des rapports entre loi divine et loi humaine. Il y réussit apparemment au moyen d'une architecture rhétorique savante dont on peut décomposer la structure. Mais on soupçonne assez vite que cette virtuosité cache tout un système de représentation beaucoup moins directement lié à la conjoncture politique.

Summary

Summary

In the poem to king Robert d'Adalbéron of Laon, we find hidden, behind a rigorous rhetorical structure, a whole ideological and mythical background. The pairwise opposition of social groups—clerics and serfs, warriors and monks, serfs and warriors—rests on symbolic and fantasmatic catégories: the clothed and the naked, the orator and the mute, the bestial and the divine, the pure and the impure, etc. In short, “those who pray” are separated from the laity by their rejection ofthe world ofthe genus, that is, ofsexuality and thefamily. Among the laity, serfs and warriors share tl\e universe ofthe genus; the latter possess the noble portion ofit with the use ofthe potestas, while the former are at once the ill-born and the dominated. This tripartite représentation ofsociety can exist only by means ofa subterfuge which permits Adalbéron to integrate the monks in the group ofthe clerics. This transposition is necessary in order to strengthen the mythical image ofa royal power which is in trouble by reviving an ancient conception of sovereignty of Indo-European origin.

Type
Idéologies et Cultures
Copyright
Copyright © Les Éditions de l’EHESS 1978

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References

Notes

1. Biographie récente par R.-T. Coolidge, « Adalbero, Bishop of Laon », Studies in médiéval and renaissance history, II, Lincoln, 1965. Le texte est édité dans C. A. Huckel, Les poèmes satiriques d'Adalbéron de Laon, XIII, Bibliothèque de la faculté des lettres de Paris, Paris, 1901. Nous faisons référence à cette édition. Voir aussi : E. Hegener, « Politik und Heilsgeschichte : Carmen ad Robertum regem », dans Mittellateinisches Jahrbuch, 9, 1973, pp. 31-38.

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3. Il semble qu'il y ait eu à Laon, dès cette époque, des caplte censt.- cf. F. Vercauteren, Études sur les civitates de la Belgique seconde, Académie royale de Belgique, Mémoires, XXXIII, Bruxelles, 1934, pp. 342-343.

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5. Ce texte vient du Pseudo-Cyprien, J.-F. Lemarignier, Le gouvernement royal, op. cit., p. 25.

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15. Ibid., pp. 546-547.

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18. J. Le Goff et P. Vidal-Naquet, « Lévi-Strauss… », op. cit., p. 557.

19. Ibid., p. 558.

20. Ibid.

21. M. Bloch, op. cit., pp. 422-423.

22. Éd. Mario Roques, p. 12, vers 367-369.

23. J. Le Goff et P. Vidal-Naquet, « Lévi-Strauss… », op. cit., p. 551.

24. Vlta par Odon de CLUNY, Btbllotheca cluniacensis, p. 68.

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26. A. Fliche, Le règne de Philippe Ier, Paris, 1912, p. 3.

27. Voir notre étude à paraître dans les Actes du congrès de la Société des médiévistes de l'enseignement supérieur, Tours, juin 1977.

28. E. Delaruelle dans Histoire du catholicisme en France, t. I, Paris, 1962, pp. 203-207.

29. G. Bihlmeyer et H. Tuchle, Histoire de l'Église, t. II, p. 93.