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Le rôle du parti dans le laboratoire totalitaire italien

Published online by Cambridge University Press:  25 May 2018

Emilio Gentile*
Affiliation:
Université « La Sapienza », Rome

Extract

Le parti fasciste a dominé la politique italienne pendant vingt ans. En 1942, l'année qui précède la fin du fascisme, 27 millions d'Italiens, soit 60 % des habitants du pays, se trouvaient encadrés dans le PNF et dans les organisations qui en dépendent. De 1922 à 1943, l'Italie fut transformée en « un vaste laboratoire humain », où le parti fasciste tenta de réaliser un projet de société hiérarchique militarisée, destiné à intégrer les individus et les classes dans un « État nouveau » totalitaire, instrument de puissance et de domination. L'expérience totalitaire fasciste se heurta à des obstacles qu'elle ne parvint pas à surmonter, et même si elle se solda par un échec, elle demeure importante pour l'analyse historique de l'autoritarisme moderne et du phénomène du parti unique. La constatation des limites et de l'échec final ne peut exclure l'utilité d'une étude des résultats effectifs que le parti obtint grâce à la nouvelle forme de domination, de mobilisation et d'intégration des masses dans l'État que d'autres mouvements contemporains prirent comme modèle.

Summary

Summary

The article is a new attempt to define thefunction of the fascist party in power by analysing its juridical position in the State, its activities and its policy in the fascistisation ofmen and women, since their birth. According to a common view, the party was a mère and passive instrument of Mussolini's dictatorship. The article gives a différent interprétation of the rôle of the party. Even if the party was legaly submitted to the State, it always claimed the right to control every aspect of public life. The party actually tried to subvert the State in order to achieve a real panification of the State. In this perspective, the article analyses the way the party spread its tentacles in the structure of the régime and society, and how it moulded men and women to breed "new Italians".

Type
Fascisme, Nazisme
Copyright
Copyright © Les Éditions de l’EHESS 1988

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References

Notes

1. L'expression est tirée de PNF, Il cittadino soldato, Rome, 1936, p. 31.

2. Pour les références bibliographiques et un état critique des études sur le PNF qui ne sont pas directement citées dans le texte, je renvoie à E. Gentile, « La natura e la storia del partito nazionale fascista nelle interpretazioni dei contemporanei e degli storici », Storia contemporanea, nc 3, juin 1985.

3. Cf. E. Gentile, « The Problem of the Party in Italian Fascism », Journal of ContemporaryHistory, 1984, pp. 251-274.

4. Prelot, M., L'empire fasciste, Paris, 1936, p. 220.Google Scholar

5. G. Salemi, « L'organizzazione nazionale del partito fascista e i suoi rapporti con lo Stato », Rivista di diritto pubblico, I, 1936, p. 325.

6. Cf. A. Aquarone, L'organizzazione dello Stato totalitario, Turin, 1965. R. De Felice, Mussolini il fascista, I, Turin, 1966. Id., Mussolini il fascista, II, Turin, 1968.

7. IlGran Consiglio neiprimi dieci anni dell'era fascista, Rome, 1933, p. 24.

8. Ibid., p. 217.

9. Le texte des statuts du PNF de 1921 à 1938, avec certaines autres modifications, le règlement du PNF de 1938 et les lois concernant le Grand Conseil et le PNF, auxquelles nous ferons référence au cours de l'article, sont aujourd'hui rassemblés dans le volume de M. Missori, Gerarchie e statut! del PNF, Rome, 1987.

10. Pour notre définition du PNF comme parti d'orientation totalitaire nous renvoyons, outre les articles déjà mentionnés, à notre communication « Il partito nel fascismo italiano » à paraître prochainement dans les Actes du colloque sur l'Estado novo (1926-1959), tenu à Lisbonne les 4-6 novembre 1986 et à E. Gentile, « Fascism in Italian Historiography : in Search of an Individual Historical Identity », Journal of Contemporary Hislory, 1986, pp. 179-208.

11. Cf. B. Mussolini, Opéra Omnia, Florence, 1955, XVI, pp. 276-277.

12. Voir dans G. A. Chiurco, Storia délia revoluzione fascista, Florence, 1929, IV, Ire partie, pp. 489-495. Voir également, pour la même évaluation, les directives pour l'organisation des escouades fascistes, émanant de la Direction du PNF au début de 1922, ibid., pp. 485-489.

13. B. Mussolini, Opéra Omnia, Florence, 1958, XXIV, pp. 141-142.

14. Voir le texte dans M. Missori, op. cit., pp. 367-369.

15. Cf. P. Chimienti, « Il segretario del partito », Bibliografia fascista, octobre 1932, pp. 595-599.

16. O. Raneletti, « Il Partito Nazionale Fascista nello Stato italiano », Rivista di diritto pubblico, 1939, pp. 37-38.

17. Pour ce problème, cf. L. Shapiro, J. W. Levis, « The Roles of the Monolithic Party under the Totalitarian Leader », dans J. W. Lewis, Party Leadership and Revolutionary Power in China, Cambridge, 1970, pp. 114-115, et L. Shapiro, The Communist Party of the Soviet Union, New York, 1971, pp. 619-629.

18. Ces données sont extraites d'une note du secrétaire administratif du PNF de septembre 1930, dans Archives Giuriati.

19. Il Gran Consiglio nei primi dieci anni, op. cit., p. 257.

20. Pour ces données, cf. « Foglio d'ordine » del PNF, n° 5, 3 septembre 1926 ; A. Tamaro, Venti anni di storia 1922-1943, Rome, 1953, II, p. 223 ; R. De Felice, Mussolini il fascista, II, op. cit., pp. 187-188 ; sur Turati, cf. P. Morgan, « Augusto Turati », dans Uomini e volti del fascismo (sous la direction de F. Cordova), Rome, 1980, pp. 475-519.

21. Cf. G. Giuriati, La parabola di Mussolini nelle memorie di un gerarca (préparé par E. Gentile), Rome-Bari, Laterza, 1981, pp. 131-157.

22. Il manque une étude d'ensemble sur les mutations sociales à l'intérieur du PNF, entre la masse des inscrits et les cadres dirigeants. Pour une première analyse, l'étude de Secondino Tranquilli (Ignazio Silone) est toujours utile : « Elementi per uno studio del PNF », Stato Operaio, octobre 1927 ; id., « Borghesia, piccola borghesia e fascismo », ibid., avril 1928.

23. Nous tirons ces chiffres d'un calcul approximatif sur les données biographiques des hiérarques du PNF, reconstituées pour la première fois par M. Missori, Gerarchie e statuti del PNF, op. cit.

24: Cf. A. Tamaro, op. cit., p. 299.

25. Pour la définition du « césarisme totalitaire », cf. E. Gentile, « Partito, Stato e Duce nella mitologia e nella organizzazione del fascismo », dans Fascismo e nazionalsocialismo, sous la direction de K. D. Bracher et L. Vallani, Bologne, 1986, pp. 265-294. Sur le mythe de Mussolini, cf. R. De Felice, L. Goglia, Mussolini, il mito, Rome-Bari, Laterza, 1983 ; E. Gentile, « Il mito dello Stato nuovo », pp. 245-249 ; id., « Il mito di Mussolini », Mondo Operaio, juillet 1983, pp. 114-128.

26. PNF, Il partito nazionale fascista, Rome, 1936, pp. 49-51.

27. Cf. V. Zanoara, Il partito e lo Stato, Catane, 1935, pp. 197-204, qui exagère beaucoup le rôle du secrétaire du PNF ; il faut noter que l'auteur, qui était professeur de droit constitutionnel, était membre du directoire national du PNF de 1934 à 1937 et devint vice-secrétaire du parti de 1937 à 1939.

28. Lyttelton, A., La conquista delpotere, Rome-Bari, Laterza, 1974, pp. 265269.Google Scholar

29. Cf. L. Salvatorelli, G. Mira, Storia dell'Italia netperiodo fascista, Turin, 1964, p. 390.

30. A. Aquarone, L'organizzazione dello Stato totalitario, pp.74-75.

31. R. Fried, « The Italian Prefects. A Study », Administrative Politics, New Haven-Londres, 1963, p. 178 ss.

32. Archives Serena, note du secrétaire du PNF Adelchi Serena au chef du gouvernement.

33. Archives centrales de l'État (ACS), division Police politique, b 102.

34. R. De Felice, Mussolini il Duce, I, Turin, 1974, p. 202.

35. Cf. G. Giuriati, op. cit., pp. 299-300.

36. Archives Giuriati.

37. Cf. T. Cianetti, Memorie dal carcere di Verona, Milan, 1983, p. 212.

38. G. Bottai, Diario 1935-1944, Milan, 1982, p. 128.

39. Archives Serena, note pour le Duce, Rome, 20 novembre 1940.

40. Cf. G. Neppi Modona, « La magistratura e il fascismo », Fascismo e societa italiana, Turin, 1973, pp. 148-149.

41. Cf. C. Toesca DI Castellazzo, G. Binello, Il partito nella vità economica italiana, Turin, 1938.

42. Luigi Goglia a mis l'accent sur cet aspect dans L. Goglia, F. Grassi, Il colonialismo italiano da Adua all'Impero, Rome-Bari, Laterza, 1981, pp. 221-222 et 234.

43. Cf. C. Giglio, Partito e impero, Rome, 1939.

44. Foglio di disposizioni, 2 juillet 1937, n° 834.

45. Cf. V. De Grazia, Consenso e cultura di massa nell'Italia fascista, Rome-Bari, 1981.

46. G. Bottai, op. cit., p. 72.

47. Le jugement de Dino Grandi, qui dut affronter directement la politique d'infiltration et de contrôle du parti dans la période où il fut ministre de la Justice, du 12 juillet 1939 au 7 février 1943, ne vaut pas que pour lui : « Au parti ont été donnés depuis peu des pouvoirs exceptionnels. Il contrôle et dirige toute la vie du pays. Le secrétaire du parti devient le numéro deux du régime. Il abandonne toute apparence de parti et devient une sorte d'immense caserne. Cette immense bureaucratie du parti est sa perte. Les ministres, les préfets, les députés, la cour, les militaires avaient peur. Starace était partout l'ombre de Mussolini, les Italiens haïssaient Starace mais c'est Mussolini qui faisait tout. Il a été l'instrument par lequel la dictature a tué le fascisme. » Le jugement, tiré du texte inédit des mémoires de Grandi, écrites entre 1943 et 1947 (Archives de Felice, fonds Dino Grandi, B 153 f 200) a été confirmé, sur un ton moins dramatique, dans des souvenirs autobiographiques publiés récemment : Il mio paese, Bologne, 1985, pp. 554-556. Selon Grandi, après que l'ingérence du parti se fût atténuée durant le secrétariat Muti, les méthodes de Starace reprirent avec plus de vigueur sous le secrétariat Serena, id., p. 481.

48. R. De Felice, Mussolini il Duce, II, Turin, 1981, pp. 3-155.

49. Gerarchia, 1937, pp. 131-132, cité dans P. Pombeni, Demagogia e tirannide, Bologne, 1984, p. 295.

50. Cf. F. Stramacci, « Sulla riforma délia rappresentanza politica nel ventennio fascista : i lavori délia Commissione Solmi (1936-1938) », Ctio, n° 1, 1986, pp. 137-156.

51. Archives Serena, rapport du Bureau d'études et de législation du PNF, 20 décembre 1941.

52. D. Grandi, op. cit., p. 481.

53. ACS, ministère de la Culture populaire, b 79, circulaire de l'inspecteur du PNF, chef du Bureau d'études et de législation s. d.

54. PNF, Ventianni, Rome, 1942,1, pp. 147-148.

55. E. Gentile, limita dello Stato nuovo, cité pp. 231-252.

56. Id. Le origine dell'ideologia fascista, Bari, 1975, pp. 422-424.

57. U. Bernasconi, « Vitadi masse », Gioventù fascista, Ier mai 1934.

58. N. Chiappetti, Il fascio di combattimento e il gruppo rionale fascista, Rome, 1937.

59. Cité dans M. Paixa, Firenze nel régime fascista 1929-1934, Florence, 1978, p. 200.

60. D. Detragiache, « Il fascismo femminile da San Sepolcro all'affare Matteotti, 1919-1925 », Storia contemporanea, n° 2, avril 1983, pp. 211-250.

61. Cf. M. Fraddosio, « Le donne e il fascismo. Ricerche e problemi di interpretazione », Storia contemporanea, n° 1, février 1986, pp. 95-135 ; E. Mondello, La nuova italiana, Rome, 1987.

62. Dizionario di politica, élaboré par le PNF, Rome, 1940, article « Gioventù italiana del littorio », p. 304.

63. Archives du parti communiste, 1181/1, Informations sur la situation italienne et le travail du PCI, 25 septembre 1934.

64. ACS, PNF, Situation politique par province, b 10, Nuoro, rapport du secrétaire fédéral du 25 juin 1935 et du 23 janvier 1936.

65. Cf. P. Nello, L'avanguardismo giovanile aile origine del fascismo, Rome-Bari, Laterza, 1978 ; C. Betti, L'Opéra nazionale Balilla e l'educazione fascista, Florence, 1984.

66. N. Zapponi, « Il partito délia gioventù. Le organizzazioni giovanili del fascismo 1926- 1943 », Storia contemporanea, n° 4-5, octobre 1982, pp. 569-633 ; Tracy H. Koon, Believe Obey Fight, Chapel Hill-Londres, 1985 ; pour les rapports entre le parti et le ministère de l'Éducation nationale, cf. M. Ostenc, La scuola italiana durante il fascismo, Rome-Bari, Laterza, 1981.

67. Archives Serena, Rapport sur l'activité de la GIL en l'an XIX;

68. Cf. N. Zapponi, art. cit. p. 572.

69. A. Turati, Una rivoluzione e un capo, Rome-Milan, s.d., pp. 130-131.

70. Cf. Atti del PNF, 28 octobre-29 octobre XII, E. F., Rome, s. d., III, pp. 80-81.

71. Cf. Dizionario di politica, op. cit., article « Gruppi universitari fascisti », p. 400 ; M. Giuntella, « I gruppi universitari fascisti nel primo decennio del régime », Il movimento di liberazione in Italia, avril-juin 1972, pp. 3-38 ; P. Nello, « IlCampano », autobiografia politica del fascismo universitario pisano (1926-1944), Pise, 1983.

72. C'est ce qu'observe, par exemple, la revue communiste Stato Operaio en 1934 (Marcussi, « La conquista dei giovani », n° 8, août 1934, pp. 585-588).

73. Discours du 28 mars 1926 dans Mussolini, op. cit., XXII, p. 100.

74. ACS, secrétariat particulier du Duce, correspondance réservée, b 41.

75. Un document typique de cet état d'esprit est relevé chez un informateur de la police de Florence le 5 janvier 1939 (ACS, Polizia politica, 1927-1944, b 220).

76. S. Minocchi, « Mistica del partito », Rivoluzione, 20 janvier 1940, organe du GUF de Florence.

77. U. Indrio, « Idée sul partito unico », Nuova civiltà per la nuova Europa, Rome, 1941, p. 258.

78. R. Farinacci, « Precisazioni », La vita italiana, décembre 1941, cité dans R. De Felice, Autobiografia delfascismo, Rome, 1978, p. 281.

79. Discours de Mussolini du 27 janvier 1942 en réponse au rapport des secrétaires fédéraux, dans Rapporto al Duce, Milan, 1978, p. 194.

80. Foglio d'ordini, n° 293, 25 juin 1943.