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Problèmes et méthodes d'une histoire de la psychologie collective1

Published online by Cambridge University Press:  26 July 2017

Alphonse Dupront*
Affiliation:
Sorbonne

Extract

L'Histoire de la Psychologie Collective, vieille cependant comme l'histoire, est en train de se définir lentement. L’ « invention » de la psychologie sociale, et surtout la conscience claire aujourd'hui, au champ des sciences humaines, de tout ce monde inexploré, ou refusé, du collectif, nous imposent de la distinguer comme une discipline particulière et donc de lui donner et sa matière et ses méthodes. Non par goût d'une province de plus dans la connaissance historique, mais parce que nous découvrons qu'elle est nécessaire.

Je n'aurai pas la présomption de vous démontrer, dans le temps sagement mesuré d'une communication, cette nécessité, encore moins de plaider pour un droit à l'existence, déjà un peu partout reconnu. Le plus simple, et aussi le plus honnête, est d'étaler devant vous, discrètement, ambitions, réflexions, quelques certitudes et de proposer à ceux d'entre vous que ces rêveries retiendraient, un programme de travail.

Type
Research Article
Copyright
Copyright © Les Éditions de l’EHESS 1961

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Footnotes

1

Communication présentée au XIe Congrès International des Sciences Historiques, à Stockholm, le 24 août 1960, dans la première Section, consacrée à la méthodologie historique.

References

page 3 note 2. Par exactitude du fait, nous garderons l'expression d’ « histoire de la psychologie collective ». Elle n'est cependant pas satisfaisante, parce qu'équivoque : même en français, elle peut être entendue comme la seule histoire d'une discipline particulière, qui s'appellerait « psychologie collective »; et à l'usage d'auditoires étrangers, — l'expérience en vient d'être faite à Stockholm — elle est une manière de gallicisme trop secret, qu'une mécanisation mentale normale déséquilibre tout de suite, mettant plus l'accent sur le psychologique que sur l'historique. Si nous acceptions le grec avec son indéfinie perfection, « histoire de la psyché collective » dirait bien de quoi il s'agit. Et tant que nous n'aurons pas fait nôtre l'étrange mais nécessaire expression d’ « analyse du mental collectif », il faudra se servir d'énumérations un peu processionnelles, telles que : histoire des valeurs, des mentalités, des formes, des symboliques, des mythes, soit en général, soit d'une civilisation déterminée.

page 4 note 1. Nous n'userons bien, « existentiellement », de l'histoire, que si nous arrivons à définir un équilibre entre le continu, ou récit historique traditionnel, qui a peur des « trous » dans la contexture même du temps, et le divers. Avec cette donnée brute, à notre avis essentielle : si l'histoire n'ennuie pas ou n'oppresse pas mortellement, c'est qu'elle « varie », ou du moins contraint au dialogue.

page 5 note 1. La mémoire collective est la matière même de l'histoire. N'est-il pas très significatif d'une mentalité, la nôtre, dite moderne, que nous ne l'ayons encore quasi pas différenciée comme matière d'étude ? Il est cependant évident, dès les commencements d'une analyse du mental collectif, que le mental change moins vite que ne le font le « corps » ou les environnements matériels, voire les institutions. Dans un temps de « mue » comme celui d'aujourd'hui pour l'Occident moderne, nous pouvons le vérifier chaque jour.

page 10 note 1. Une conscience et une pratique de la « longue durée » historique, mettant en oeuvre l'intuition si préhensive de Fernand Braudel, s'imposent à toute historiographie exigeante de la saisie la plus entière possible du phénomène. Peut-on ajouter que rigoureusement, équanimement conduites, elles nous libèrent d'une philosophie de l'histoire, qui n'est trop souvent qu'un jeu étincelant à propos d'histoire ?

page 10 note 2. Dans la discussion qui a suivi la présentation de notre communication, un historien Scandinave est venu déclarer, d'une façon aussi élégante que brève et péremptoire, qu'il n'avait jamais rencontré au travers de l'histoire que des hommes, et jamais rien de collectif. Si nous le signalons ici, c'est que cette position abrupte, autant qu'excessive, n'est pas sans grandeur. C'est un beau témoignage « moderne ». Mais il est évident que la marque du temps neuf en nous est celle de l'ambivalence, individu et collectif, également distincts, également unis.

page 11 note 1. Ainsi les valeurs sacrées de l'espace et du temps, telles que l'on peut les rendre manifestes dans les grandes gestes collectives, telles que pèlerinages, croisades, etc., ou dans cette instance ascétique de la peregrinatio, qu'entreprend d'étudier au travers du monde monastique du premier Moyen Age, l'éminent éditeur des oeuvres complètes de Saint Bernard, Dom Jean Leclercq, moine de Clervaux.