Hostname: page-component-84b7d79bbc-rnpqb Total loading time: 0 Render date: 2024-07-26T00:45:09.720Z Has data issue: false hasContentIssue false

Générations politiques, rationalité économique et appui à la souveraineté au Québec*

Published online by Cambridge University Press:  10 November 2009

Pierre Martin
Affiliation:
Université de Montréal

Abstract

Is political choice under conditions of uncertainty influenced more by expected losses than by expected gains? Does the relative importance of economic rationality in political choice vary between generations? The analysis of individual opinion on sovereignty in Quebec sheds new light on these questions. Among determinants of individual support for sovereignty, apprehensions of possible losses play a more important role than expectations of possible gains. The relative importance of the evaluation of economic consequences in the decision to support sovereignty, however, differs across three generations. These differences can be explained with reference to the economic context that prevailed when members of each generation reached adulthood.

Résumé

Le choix politique dans l'incertitude est-il plus influencé par la crainte de perdre des acquis que par la perspective de réaliser des gains? La part de la rationalité économique dans la décision politique varie-t-elle selon les générations? L'analyse de l'opinion relative à la souveraineté au Québec apporte un éclairage nouveau sur ces questions. Dans l'explication de l'opinion sur la souveraineté, la crainte de pertes économiques est plus déterminants que la perspective de gains. On observe cependant des différences entre générations pour ce qui est de l'importance relative de l'éevaluation des conséquences économiques dans la décision d'appuyer la souveraineté. Ces différences s'expliquent par le contexte économique qui prévalait au moment du passage de ces générations à l'âge adulte.

Type
Research Article
Copyright
Copyright © Canadian Political Science Association (l'Association canadienne de science politique) and/et la Société québécoise de science politique 1994

Access options

Get access to the full version of this content by using one of the access options below. (Log in options will check for institutional or personal access. Content may require purchase if you do not have access.)

References

1 La théorie de l'utilité espérée (expected utility theory) sous-tend l'approche strictement économique des comportements politiques. L'exposé de base de cette approche théorique reste celui de John von Neumann et Oskar Morgenstern, Theory of Games and Economic Behavior (3e ed.; Princeton: Princeton University Press, 1953)Google Scholar.

2 Kahneman, Daniel et Tversky, Amos, «Prospect Theory : An Analysis of Decision under Risk», Econometrica 47 (1979), 263291CrossRefGoogle Scholar; et Tversky, Amos et Kahneman, Daniel, «Rational Choice and the Framing of Decisions», Journal of Business 59 (1986), 251278CrossRefGoogle Scholar.

3 Quattrone, George A. et Tversky, Amos, «Contrasting Rational and Psychological Analyses of Political Choice», American Political Science Review 82 (1988), 719736CrossRefGoogle Scholar.

4 Inglehart, Ronald, «The Silent Revolution in Europe: Intergenerational Change in Post-Industrial Societies», American Political Science Review 65 (1971), 9911017CrossRefGoogle Scholar; et Inglehart, Ronald, Culture Shift in Advanced Industrial Societies (Princeton: Princeton University Press, 1990)Google Scholar. La théorie d'Inglehart a été appliquée au cas canadien par Bakvis, Herman et Nevitte, Neil, «In Pursuit of Post-Bourgeois Man: Post-Materialism and Intergenerational Change in Canada», Comparative Political Studies 20 (1987), 357389CrossRefGoogle Scholar.

5 Notamment, les travaux récents d'André Blais et de Richard Nadeau démontrent que, parmi les francophones québécois, les facteurs tels que l'éducation, les classes sociales, le secteur d'emploi et le sexe ont perdu l'importance explicative qu'ils avaient au moment du référendum de 1980. Blais, André et Nadeau, Richard, «To Be or Not to Be a Sovereignist? Quebeckers' Perennial Dilemma», Canadian Public Policy/Analyse de politiques 18 (1992), 89103CrossRefGoogle Scholar; Nadeau, Richard, «Le virage souverainiste des Québécois, 1980–1990», Recherches sociographiques 33 (1992), 928CrossRefGoogle Scholar; et Blais, Andre et Nadeau, Richard, «L'appui au Parti québécois: évolution de la clientèle de 1970 à 1981» et "La clientele du OUI", Crête, dans Jean, dir., Comportement électoral au Québec (Chicoutimi: Gaëtan Morin éditeur, 1984), 279318Google Scholar et 321–34.

6 Nadeau, Voir, «Le virage souverainiste des Québécois»; et Cloutier, aussi Édouard, Guay, Jean H. et Latouche, Daniel, Le virage: devolution de l'opinion publique au Québec depuis 1960, ou comment le Québec est devenu souverainiste (Montréal: Editions Québec/Amérique, 1992)Google Scholar.

7 Pour un exposé de cette perspective théorique, Meadwell, voir Hudson, «The Politics of Nationalism in Quebec», World Politics 45 (1993), 203241CrossRefGoogle Scholar; et Meadwell, aussi Hudson, «Transitions to Independence and Ethnic Nationalist Mobilization», Booth, dans William James, James, Patrick et Meadwell, Hudson, dirs, Politics and Rationality (New York: Cambridge University Press, 1993), 191213Google Scholar. Meadwell présente les facteurs identitaires tels l'attachement à la collectivité québécoise et le sentiment de rejet par le reste du Canada comme des conditions contribuant à la formation de l'opinion sur la souveraineté, alors que l'anticipation des conséquences économiques de la souveraineté représente d'abord une condition contraignante. Pour une approche différente de la formation de l'opinion sur la souveraineté, qui reprend toutefois une variante des deux dimensions énoncées ici, voir Stéphane Dion, «Why Is Secession Rare? Lessons from Quebec», manuscrit, Département de science politique, Université de Montréal, 1993. Il convient de rappeler que les variations dans le temps ou entre individus de ces dimensions rationnelle et affective (par exemple, la perception de l'impact économique de la souveraineté et le degré d'attachement au Canada et au Québec) méritent elles-mêmes d'être expliquées, mais ce n'est pas le but du présent exercice.

8 Blais et Nadeau, « To Be or Not to Be a Sovereignist».

9 Pinard, Maurice, «The Quebec Independence Movement: A Dramatic Reemergence», Working Papers in Social Behaviour (Montréal: Département de sociologie, Université McGill, 1992)Google Scholar.

10 Dion, «Why Is Secession Rare?»; et Meadwell, «The Politics of Nationalism in Quebec?». Dans «The Quebec Independence Movement», Pinard observe une nette progression de l'anticipation de conséquences é1conomiques positives de la souveraineté dans l'opinion, mais les sources utilisées varient, ce qui rend les comparaisons aléatoires.

11 Pour deux points de vue très différents, voir Patrick Grady, « Les consequences économiques de la souveraineté du Québec » et Pierre Fortin, « Les conséquences économiques de la souveraineté du Québec: analyse exploratoire », dans Commission d'étude des questions afférentes a l'accession du Québec à la souveraineté, Exposés et études, Vol. 4: Les Implications de la mise en oeuvre de la souveraineté: les aspects économiques et les finances publiques, deuxième partie (Québec: Assemblée nationale, 1992), 575588Google Scholar, 591–629.

12 Nadeau, «Le virage souverainiste des Québécois», 16.

13 Selon Inglehart, le développement des valeurs politiques dépend en partie de la hiérarchie des besoins établie par Maslow, Abraham, Motivation and Personality (New York: Harper, 1954)Google Scholar. Les individus dont le passage à lêage adulte et la formation des opinions politiques s'effectuent dans un contexte de privation relative résultant d'une croissance économique lente auraient done tendance à accorder plus d'importance, dans leurs choix politiques, aux impéatifs de séeurité économique (Inglehart, « The Silent Revolution in Europe », 991).

14 Il est difficile de délimiter clairement dans le temps la période de croissance rapide du Québec, mais la période de 20 ans entre 1955 et 1975 constitue une approximation valable. Fréchette, Voir Pierre, «Croissance et changements structurels de l'économie», Daigle, dans Gérard, dir., Le Québec enjeu (Montréal: Les Presses de l'Universite» de Montréal, 1992)Google Scholar.

15 Ricard, FranÇis, La génération lyrique: essai sur la vie et l'oeuvre des premiers-nés du baby-boom (Montréal: Boréal, 1992)Google Scholar; et Grand'Maison, Jacques et Lefebvre, Solange, Une génération bouc-émissaire: enquêtre sur les baby-boomers (Montréal: Fides, 1993)Google Scholar.

16 Benoît, Selon la formule de FranÇois et Chaveau, Philippe, Acceptation globale. Une histoire de générations: « Ta Volvo contre mon B.S. » (Montréal: Boreal, 1986)Google Scholar. Le livre, écrit sur un ton satirique, donne une description mordante des tensions entre trois générations qui se comprennent peu. Sur le « matérialisme » de la nouvelle génération, ils écrivent: «Les jeunes sont accusés de ne pas avoir d'idéal. Non seulement ils sont obsédés par l'argent mais, en plus, ils n'arrivent pas à en avoir»(93).

17 Dion, Cité dans Léon, Nationalismes et politique au Québec (Montréal: Hurtubise HMH, 1975), 89Google Scholar.

18 Après 1975, le chômage des jeunes de 15 à 25 ans au Québec par rapport é celui des 25 ans et plus a fait un bond important. La différence entre les deux groupes a atteint près de 15 pour cent en 1982, au moment où le chùmage des jeunes atteignait un plafond dàenviron 25 pour cent (Fortin, Pierre, «Conjoncture, déimographie et politique: où va le chômage des jeunes au Québec?» Dumont, dans Fernand, dir., Une société des jeunes? [Québec: Institut québécois de recherche sur la culture, 1986], 191207)Google Scholar.

19 Canadian Facts, CBC/Globe and Mail Public Opinion Poll (Toronto: Canadian Facts, 4–15 avril 1991)Google Scholar. Banque de données informatisée. Cette même banque de données a été utilisée dans Blais et Nadeau, « To Be or Not to Be a Sovereignist», où les non-francophones sont également exclus de l'analyse. Nous remercions notre collègue André Blais de nous avoir donné accès à cette banque de données.

20 Cette question a été préférée a deux autres dont les préambules présentaient un scénario préalable au choix en faveur de la souveraineté. Cette étude reprend la méthode de définition de la variable dépendante adoptée par Blais et Nadeau, « To Be or Not to Be a Sovereignist».

21 Dans le cas de variables d'pendantes dichotomiques, les coefficients estimés par une régression linéaire peuvent être interprétés comme la variation dans la probabilité d'appui à la souveraineté correspondant à une variation d'une unité de la variable indépendante. Lorsque, comme ici, la variable dépendante est distribuée de façon a peu près égale entre 0 et 1, la méthode des moindres carrés ordinaires donne des résultats comparables aux méthodes logit ou probit, tout en étant plus simple d'interpretation. Cependant, dans quelques cas, les probabilités estimées dépassent les bornes du possible (0 et 1). Aldrich, Voir John H. et Nelson, Forrest, Linear Probability, Logit, and Probit Models (Beverly Hills: Sage, 1984)CrossRefGoogle Scholar; Johnston, Richard, Blais, André, Brady, Henry E. et Crête, Jean, Letting the People Decide: Dynamics of a Canadian Election (Montréal: McGill-Queen's University Press, 1992), 261262Google Scholar. Les équations présentées ici ont été estimées par la méthode de régression logistique, sans que des différences notables aient été détectées.

22 D'autres variables souvent retenues dans de telles éludes, incluant le sexe, le revenu et lééducation, ont été mises de côté après vérification, en raison de l'absence d'un lien significatif à l'intérieurde l'équation de régression multiple.

23 Cette technique est préférable à la comparaison des résultats de plusieurs régressions distinctes, puisqu'elle permet de contrôler les effets d'autres facteurs explicatifs en maintenant leurs effets constants entre les trois groupes, et elle permet de réduire l'erreur-type des coefficients estim's. Hanushek, Voir Eric A. et Jackson, John E., Statistical Methods for Social Scientists (New York: Academic Press, 1977), 128Google Scholar.

24 Il faut noter qu'en l'absence de la variable « génération d'êge moyen », cette variable devient significative au seuil de 0,05, sans changer l'effet des autres variables.

25 L'estimation de l'équation comprenant ces deux variables de contrôle est semblable en tout point à celle présentée au tableau 2, mais les erreurs-types sont un peu plus grandes.

26 L'effet presque nul de la variable « génération des aînes » en présence de la variable d'interaction (b =,0004; t =,0009) suggère que l'effet de génération observé par plusieurs chercheurs n'est qu'un reflet de la propension plus grande de ce groupe à craindre les conséquences éeonomiques de la souveraineté.

27 Voir Fortin, «Les conséquences économiques de la souveraineté».

28 Pour les jeunes, les personnes d'êge moyen et les aînés, les totaux respectifs sont: 0,300,0,154 et 0,293.