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En Nivernais : Les assurances au XIXe siècle

Published online by Cambridge University Press:  26 July 2017

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Si l'on fut rarement tenté d'étudier les débuts des compagnies d'assurances en province, c'est sans doute parce que les sources d'archives locales ou parisiennes font défaut aussi bien que les statistiques ; par suite, il est difficile de dégager une évolution certaine de documents très fragmentaires. Cependant, le monde complexe de l'assurance, avec ses techniques encore incertaines au départ, mériterait d'être mieux connu : l'organisation des réseaux d'agents de grandes compagnies, leur influence sur le milieu rural, l'importance de l'épargne « collective » ainsi recueillie, le caractère spéculatif des assurances, les obstacles psychologiques qu'elles rencontrent en province, la croissance du secteur « social », autant de chapitres d'une histoire qui n'est point encore écrite mais qui apparaît d'avance très révélatrice des changements de mentalité au cours du XIXe siècle. Nous voudrions tenter ici une brève esquisse de l'évolution des assurances, en prenant pour exemple une province où le goût de l'épargne était fort prononcé.

Type
Études
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Copyright © Les Éditions de l’EHESS 1964

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References

1. Sur les assurances en province, jusqu'ici fort peu étudiées, on se reportera à P. Leuilliot, L'Alsace au XIXe sièclet. I I , pp. 244-246, et pour Rouen, à E. Layer L'Assurance à Rouen au XIXe siècle(Rouen, 1917, extrait des Mémoires de l'Académie de Rouen).

2. On ne dispose pas d'une bonne histoire générale des assurances. L'ouvrage touffu de M. Senès, Les origines des compagnies d'assurances soit à primes, soit mutuelles fondées en France depuis le Xviiie siècle jusqu'à nos jours(1900) n'a pas encore été remplacé. Les livres de Centenaire de la Compagnie d'assurances générales contre l'incendie et sur la vie(1819-1919), du Phénix(1819-1919), de la Nationale(1830-1930), du Soleil(1829-1929), ne donnent que des indications très fragmentaires. Aux Archives Nationales on ne trouve que des épaves, les dossiers du Ministère des Finances, ministère de tutelle, ayant été détruits ; cependant la série F 22 contient des papiers importants sur les tontines et les compagnies d'assurances sur la vie.

1. Ainsi le représentant du Phénixà Clamecy, M. de Charny, invite le sous-préfet « à le sec nd( r dans les moyens prcpr s à accrid.ter et à rendre publique c t t e institution ». Le sous-préfet en réfère au préfet, fort embarrassé, puisque la compagnie, quoique autorisée par ordonnance, est privée : on s'en tire par une circulaire aux maires, et le préfet invite même le sous-préfet à faciliter la tâche de M. de Charny. L'administration contribua beaucoup à la diffusion des assurances : toutefois le souspréfet de Château-Chinon constate, quatre ans plus tard, que la circulaire préfectorale n'a pas reçu assez de publicité.

2. On ne saurait oublier l'aspect politique du problème des assurances : les compagnies telles que le Phénixpassaient pour libérales et recrutaient souvent comme agents des officiers en demi-solde, ou des libéraux actifs, voire des carbonari(cf. P. Leuiixiot, OUV. citét. II).

3. Le Phénixfut représenté d'abord par l'agent de change de Nevers, Roger — qui passa à la Compagnie Royale—, puis par un directeur particulier, Collas, secondé par un avoué à Cosne et, à Château-Chinon, par le secrétaire de la sous-préfecture. A Collas succéda (en 1827) un banquier libéral, Achille Jacquinot.

4. Robin (qui était en même temps notaire de la Chambre de garantiede la Caisse hypothécairedont nous connaissons mal l'activité dans la Nièvre) était secondé par quatre notaires à Saint-Pierre, Saint-Saulge, Cercy et Prémery, et un ancien percepteur à Decize.

5. Le Conseil d'administration ne comprenait que de grands propriétaires : le Vicomte de Berthier-Bizy, Bonvallet (ancien secrétaire général et alors conseiller de préfecture), de Champs, secrétaire général, Flamen d'Assigny, conseiller de préfecture, le marquis de Gaillon, Pinet, ainsi qu'un imprimeur, Lefebvre-Lejeune. Nous n'avons pu retrouver aux Archives Nationales le dossier de cette société, autorisée par ordonnance royale du 16 février 1825. KUe publiait chaque année des renseignements dans l'annuaire départemental.

6. Outre 1’ « intérêt probable d'environ 10 % par an », cette société offrait « un accroissement d'environ six cents pour cent du capital lors du partage final entre tous les survivants. Ces résultats sont encore susceptibles d'augmentation ». De plus, à la différence des tontines perpétuelles, « on peut tous les cinq ans retirer la mise avec une partie des accroissements » et, « au moyen de l'assurance, les actionnaires peuvent, avant l'époque des remboursements, conserver, en cas de décès prématuré, leur mise à leurs héritiers » (Almanach de la Nièvre pour 1822pp. 135-137). De telles publicités permettaient d'attirer les bourgeois en mal de placements fructueux.

1. « Ancien chef de bureau du recrutement du Ministère de la Guerre » (sur Ymbert, cf. notre étude dans la Revue administrative1958, pp. 357-359). La Bourse générale est « la seule que permette l'ordonnance royale du 14 novembre 1821, qui défend les assurances à primes avant le tirage, en ce qu'elle donne aux familles l'unique moyen régulier et légal, soit de gagner la somme nécessaire pour se procurer directement un remplaçant, soit la somme nécessaire au départ des jeunes gens… ». Kn 1828, apparaît également, dirigée par le représentant de la compagnie Dugied, la « Compagnie d'assurances mutuelles contre les chances du tirage au sort pour le recrutement», établie à Nevers pour les départements du Centre.

2. Dugied avait réussi, par ses interventions auprès de l'administration — son représentant était le notaire Robin — à empêcher de s'installer dans la Nièvre une compagnie rivale dont le siège était à Paris : de Latre, directeur de cette dernière, disposait de forts appuis en Nivernais (M. de Pracomtal, M. de Chastellux) et écrivait même au préfet, M. de Vaisnes : « M. Guizot, votre beau-frère, m'a promis de vous écrire pour vous engager à donner votre avis qui est de forme, mais de forme essentielle… »

3. Sur cette société, ARCH. DÉP. DE LA Nièvre, M, et ARCH. NAT., F 12 2631. En 1824, dans l'arrondissement de Nevers, 300 000 F. de récoltes sont assurées et 153 000 F. de vendanges, dans l'arrondissement de Château-Chinon, 92 000 F. de récoltes. Or, la grêle avait provoqué des sinistres s'élevant à 18 000 F. pour les récoltes et 36 000 F. dans le vignoble. Le Nivernais a toujours été une région où les grêles provoquaient de graves dégâts (cf. infra).

4. Selon les termes du sous-préfet de Château-Chinon en 1824.

5. C'est une tradition durable de la société départementale, qui fait figurer dans «es placards publicitaires la liste des « principales indemnités payées depuis l'origine par la société » (par exemple, Almanach de la Nièvre pour 1833pp. 185-186). Ainsi, en 1834, pour 21 000 P. d'indemnité, la société en verse 20 000 à six gros propriétaires s'élevant respectivement à 5 500, 4 600, 3 300, 3 000, 1 863 et 1 760 F.

1. S'il y a risque de récoltes, marchandises hasardeuses, ou professions dangereuses, la prime s'élève à 0,75 F. ; pour les bâtiments de pierre couverts en paille, elle est de 1 F. ; pour ceux en torchis couverts en paille renfermant ou non des récoltes, de 1,50 F. (cf. tableau comparatif des primes entre assurances mutuelles et sociétés à primes, in Almanach de la Nièvre pour 1829p. 206). Les bâtiments en bois et torchis étaient très nombreux encore dans la Nièvre, surtout dans le Morvan et la région de Clamecy : ces hauts tarifs incitaient souvent les gros propriétaires à les détruire.

2. L'assurance de bâtiments d'une valeur de 40 000 F. ne coûte à chacun d'eux que 15 F. par an terme moyen (soit au total une cotisation de 0,75 F. °/oo). C'est grâce aux baux et à ces assurances conjointes que l'habitude d'assurer les bâtiments — surtout les granges — s'est diffusée peu à peu dans la Nièvre, pays pourtant routinier : l'assurance est devenue une clause des baux.

3. A la fin de 1829 le conseil d'administration demanda même un allégement des taux. Notons la répartition des bâtiments assurés par la société en 1828 : Tarifs des cotisations Valeur des bâtiments Cotisations réelles 0,50 F. 8,8 millions 0,15 F. . 0,75F 6,7 — 0,40 F. 1 F. 2.1 — 0,65F. 1,50 F. 2,4 — 1,15 F. Pour les bâtiments en pierre (40 % du total des assurances souscrites), les cotisations effectives étaient très faibles.

4. La plupart des compagnies affirment que leurs primes «peuvent rivaliser pour beaucoup d'objets avec celles portées au tarif de la compagnie mutuelle ».

1. Alors que les compagnies assurent en général « tous les bâtiments quelconques, ou usines, fabriques, manufactures en tous genres », ainsi que le mobilier, la Société mutuellepour échapper à cette infériorité, s'est couplée, à la fin de la Restauration, avec L'Union.

2. Rappelons que Robin était notaire de la Caisse Hypothécaire.Les notaires, les banquiers, les petits prêteurs qui pullulent dans les campagnes et sont souvent des agents des compagnies d'assurances, assortissent leurs prêts de clauses d'assurances, ce qui augmente leur profit de la remise sur la police d'assurance, laquelle, bien entendu, couvre la totalité du bien hypothéqué. Quand il n'y a pas d'hypothèque, ils font parfois souscrire une assurance sur la vie à l'emprunteur.

3. La Tontine perpétuelle d'amortissement

1. Une partie des fonds est déposée chez les notaires et banquiers locaux, qui disposent ainsi de ressources supplémentaires.

2. Sur les transformations agricoles, cf. notre étude in Revue d'Histoire Economique et Sociale(1956, n° 4). Le nombre des patentes passe de 9230 (1830) à 1244 (1842) et leur valeur de 149 000 (1832) à 213 000 F. (1842).

1. Notamment le risque de transports de numéraire : la prime est assez élevée, suivant l'importance des sommes.

2. S'assurer est devenu un des éléments de l'agriculture éclairée et progressive, et la diffusion de l'assurance coïncide avec l'apparition d'une classe importante de fermiers aisés à partir de 1825-1835.

3. En 1838 on trouve en plus un employé de la recette particulière à Château- Chinon : les services financiers de l'État — percepteurs, receveurs, qui avaient un rôle de banquiers — ont beaucoup aidé à la diffusion des assurances.

4. Gonat est franc-maçon (initié en 1822) comme d'autres agents : Jacquinot, Wagnein, Jarrige. Cf. P. Auclair, La Franc-Maçonnerie dans la Nièvre(1945).

5. « Société Pierre Lévy et Cie», installée à Nancy depuis 1826 et représentée à Nevers par « Bernheim, sociétaire et M6 Paultre, notaire ». « Tous les fonds resteront entre les mains des pères de famille ou seront déposés chez les notaires qui auront fait les assurances. » En 1846 apparaît une autre Compagnie d'assurances militaires.Rappelons que les assurances de remplacement se développent après la loi du 21 mars 1832, donnant lieu à un mouvement considérable de capitaux. Pour la France, on comptait en 1855, 42 millions de primes collectées ; leur prospérité dura jusqu'en 1868.

6. Cette dernière garantit les risques d'incendies dus aux émeutes populaires, à la guerre civile et à l'emploi de la force militaire…

7. Elle s'appelait l'Union des assurances mutuelles.Son inspecteur représente également la Banque d'amortissement des dettes hypothécairesinstitution curieuse créée en 1838 (cf. A. N., F12 6829) : « le débiteur de 1 000 F., qui traite pour vingt-cinq ans, verse chaque année en sus de l'intérêt à 5 % 25 F., 10 c. et après les vingt-cinq paiements, il se trouve libéré et il n'aura payé que 627 F., 50 c. » (Almanach de la Nicvre pour 1843p. 95.) Que ce calcul était séduisant pour les petits paysans aux mains des usuriers !

1. La Prévoyance« assurances mutuelles sur la vie », dont les statuts nouveaux venaient d'être approuvés (par ordonnance du 20 août 1842), constitua en 1843 un conseil de surveillance à Nevers et à Cosne. Celui de Nevers comprenait le notaire Bouquillard, Georges Dufaud (conseiller de préfecture), le banquier Manuel, député de la Nièvre, le receveur général de Mieulle, le maître de forges de Raffin, le conseiller général et banquier Frébault, etc. Elle avait pour agent, à Nevers, Duclos, le rédacteur en chef du journal (officiel) L'Echo de la Nièvre.

2. En 1846 la société projette de créer une société de même modèle pour l'assurance des valeurs mobilières. La société départementale a dû, pour suivre les compagnies, changer la composition de son personnel cantonal. En 1843 celui-ci comprend trois percepteurs, un secrétaire de mairie, trois huissiers, un receveur-buraliste, deux greffiers de justice de paix, deux notaires, un marchand épicier.

3. « Cette année les assurés participants ont joui de l'avantage que leur accorde ce nouveau mode (d'assurances en participation) en ne payant que la moitié de leur prime (ou 50 % de bénéfice). »

4. Remise de 20 %, par exemple, aux établissements religieux et aux collectivités publiques, règlement des primes contre la grêle seulement après la moisson, « afin de rendre plus facile le paiement de la cotisation », etc.

5. Les compagnies attaquent ouvertement les sociétés mutuelles. « Dans la mutualité, déclare la Compagnie d'assurances générales contre l'incendieen 1841, indépendamment de la cotisation que (l'assuré) acquitte chaque année, il est obligé de payer sa part des pertes éprouvées par les autres assurés. Ce mode d'assurances le soumet à des paiements sans cesse renouvelés auxquels on ne peut assigner d'avance aucune limite. » La Société de la Nièvre cependant n'avait fait jamais appel à ses sociétaires, quoiqu'ayant dû baisser ses tarifs. Elle répliquait d'ailleurs qu'elle était «étrangère à toutes spéculations financières » et que « des quatre mille membres qui la composent, il n'y en a pas un seul qui puisse y faire un bénéfice ou y recevoir un émolument quelconque ». Ceci contre les sociétés « à participations ».

1. « Rapport présenté à M. le Préfet… par J. Alban Demerge, ancien entrepreneur à Chatillon en Basais», 5 septembre 1846 (A. D. de la Nièvre, M). » Aucun contrat d'assurances, propose-t-il, ne devrait être consenti ni accepté que sur une estimation détaillée qui serait préalablement faite par un des prudhommes… qui serait assermenté et qui rédigerait, concuremment avec M. le Maire ou un membre du conseil municipal délégué, un état détaillé en double copie, dont l'une serait remise à l'assureur et l'autre à l'assuré pour être jointe à la police d'assurances. »

2. Aussi la Compagnie Royale d'Assurancesprend-elle bien soin de préciser, dans sa publicité, que ses polices d'assurances « basées sur les lois sont claires et précises. La Compagnie Royales'est fait un devoir de les étendre, afin de bien faire connaître aux assurés leurs obligations et leurs droits. Elle s'est appliquée surtout à éviter les conditions capables de susciter aux assurés des embarras et des procès » (1834).

3. Selon les termes d'un curieux mémoire de Denis (A. N., Fl a 2635).

4. La Nièvre est, en 1841, le 29e département par le nombre des affaires commerciales jugées (bien avant ses voisins : Cher : 75e, Allier : 60e, Yonne : 40e), et le 32e pour le nombre d'actes notariés reçus dans l'année.

1. Cf. F. B. A. Artz, « La crise des incendies en 1330 et les compagnies d'assurances» in Revue d'Histoire Moderne(1929), pp. 96-105 et P. Leuilliot, ouvr. citép. 246. Il faudrait dépouiller les archives judiciaires pour saisir l'importance du phénomène qui s'est prolongé jusque dans les années 50. Les sinistres étaient sans doute plus fréquents parce que l'on prenait moins de précautions et que les secours étaient moins sérieux quand on savait que le propriétaire était assuré. Souvent les paysans laissaient la ferme brûler entièrement pour éviter toute contestation (cf. le témoignage en ce sens de H. Bachelin, Le Serviteur(1917), p. 110 et Le Village(1919), pp. 152-153).

2. Procès-verbal signé par les membres du Comité de Surveillance de Nevers. « Une partie (des capitaux placés à la société) a produit jusqu'à 60 % par an, ou trente fois la mise à la répartition : ce qui explique I'énormite des sommes que quantité de placeurs ont déposées ; en effet, il est commun de rencontrer sur ces listes des chiffres de 100 000 F. et au-dessus… » : une telle publicité devait avoir des effets singuliers.

3. L'on ne s'est pas dégagé de l'idée d'associations tontinières avec répartition aux survivants : « La principale combinaison de La Prévoyanceconnue comme étant généralement la plus adoptée est celle dans laquelle les assurés qui survivent à une époque déterminée partagent les mises de ceux qui sont morts. Cette association comprend toutes les constitutions ayant pour objet l'accroissement d'un capital à une époque déterminée… Les mises sont fournies soit en un versement unique, soit en plusieurs versements annu> ls… Les sociétés restent ouvertes pour se recruter de nouveaux membres, jusqu'à l'année qui précède leur liquidation… Il est tenu compte au survivant : 1° de tous ses capitaux versés ; 2° des intérêts cumulés produits par ses capitaux ; 3° d'une part proportionnelle dans les fonds versés par ses sociétaires décédés (…) 5° d'une part dans les déchéances (…) ; 6° d'une part dans le produit des forclusions provenant du défaut de production de titres dans les six mois de l'ouverture de la répartition » : c'est une véritable tontine. Pourtant, dès les années 40, commencent toutes les combinaisons de capitalisation : assurances viagères, constitution de capital de dot, d'éducation, de remplacement militaire, rentes pour « assurer l'avenir des ouvriers, journaliers, domestiques », e t c . « Cette nature d'opérations présente principalement aux pères de famille, aux employés, aux industriels, aux créanciers de grands avantages. »

1. Nous n'avons pas trouvé trace, dans les archives des grandes forges, de paiement de primes d'assurances, les grandes entreprises comme Fourchambault étant leur propre assureur.

2. Avril, dans un autre calcul, donne une prime de 30 F. pour un bien payant 450 F. de contributions (Principes généraux de comptabilité1847). D'après les livres de compte de M. de Courvol (A. D. de la Nièvre), il payait 48 F. d'assurances incendie en 1827-1828, contre 700 F. d'impôts, mais il n'assurait pas ses récoltes, ni les meubles. 11 faudrait multiplier les sondages dans les archives d'entreprises agricoles : il semble que le taux des assurances était fort élevé à cette date.

3. C'est l'objection faite à la Sockté d'Agriculture lorsqu'on envisage, en 1840, de créer une assurance des bestiaux contre… les loups. « L'administration d'une société… pour cette nature de risques présenterait beaucoup de difficultés. Ici la matière à assurer est essentiellement variable et pour un grand nombre d'assurés, il est difficile d'établir et de vérifier la nature et la valeur des objets déclarés », à la différence des risques incendie : le projet est regardé comme impraticable (Bulletin de la Société d'Agriculture1840, p. 144).

4. La baisse générale des prix rend plus lourd le poids des primes dont le taux n'a pas varié, surtout pour la grêle, la prime représentant déjà 2 % de la valeur de la récolte.

5. Pour cette caisse, on se reportera au remarquable rapport du comte Dubois au Conseil d'État sur « le projet de décret portant constitution d'une «suisse générale d'assurance des valeurs agricoles » (17 juin 1857, A. N. F12 2C35). La Caisse n'eut jamais grande activité en Nivernais, semble-t-il.

1. Une tradition ancienne existait à Nevers puisque, en 1764, les ouvriers faïenciers fondaient une caisse de retraite et de maladie (Cf. L. Gueneau, L'organisation du travail à Nevers aux XVIIe et XVIIIe siècles1919, pp. 600-601). La Caisse d'Imphy, créée en 1886, comprenait 320 cotisants et était régie par les ouvriers eux-mêmes : « l'admission dans la société est un brevet de bonne conduite, il est rare qu'un bon sujet n'en fasse pas partie. » Mais le Conseil d'État n'avait pas encore, en 1850, examiné les statuts déposés en 1836 et la société n'était pas autorisée.

2. La Caisse de Fourchambault est d'initiative ouvrière, mais le maître de forges Georges Dufaud avait revisé, en 1845, les statuts. (Cf. A. D. de la Nièvre, X.) Elle ne comprenait au départ que 60 ouvriers. Les cotisations étaient fixées à 1 F. par mois de vingt à quarante-cinq ans, à 1,25 F. au delà de quarante-cinq ans ; une « franchise de quinze jours était instituée en cas de maladie. « Le syndicat prononcera à la majorité des voix sur l'opportunité des secours accordés » ; ils étaient, pendant les trois premiers mois, de 1 F. par jour, puis de 90 c. jusqu'à un an, de 0,75 F. si la maladie était incurable. Deux visiteurs devaient constater — en s'entendant avec le médecin — l'état de santé du malade. Ce règlement minutieux comprend déjà l'essentiel des règles des assurances sociales actuelles. « Cette association, écrivait Dufaud, devrait être un excellent exemple pour les ouvriers employés dans les autres usines du département. »

3. A. D. de la Nièvre, X, Sociétés de Secours Mutuels, et F. Gimel, La Nièvre mutualiste (Cahiers du Nivernais1911). — A Nevers 250 membres payaient 0,50 F. par mois : les visites médicales étaient gratuites, et l'on remboursait 1 F . les journées de maladie jusqu'à cinquante jours (Journal d'Agriculture du département de la Nièvre 1849, p. 314). L'administration se défiait de ces sociétés : la Société fraternelle de prévoyance de Nevers(254 membres) fût dissoute le 3 décembre 1851.

4. Au 31 décembre 1853, sept sociétés mutuelles comprenaient 1 523 membres, dont les cotisations annuelles étaient de 8,50 F. (plus un droit d'admission de 3,40 F.) : les cotisations s'élevaient à 17 243 F. Les secours aux malades (7 600 journées) montaient à 8 120 F., ceux aux vieillards à 1 664 F., ceux aux veuves et orphelins à 4 662 F. ; les frais de médecins et de médicaments à 3 600 F… (A. N. F*0 742 et A. D. de la Nièvre, X.) II faudrait suivre, d'année en année, la progression des sociétés et de leurs dépenses : en 1854, elles dépensaient 20 000 F. ; en 1868, 64 500 F., dont 21 000 F. pour frais de pharmacie et médicaux et 25 000 F. pour secours en argent : on voit la progression importante des frais proprement médicaux par rapport aux prestations en argent.

5. Prévoyant même que 10 % des bénéfices iraient aux fondations pour les ouvriers (Carnetsjuin 1853).

1. Sur la gestion des caisses de Fourchambault et d'Imphy, cf. « Problèmes sociaux à Fourchambault » in Actes du 81e Congrès des Sociétés Savantes (1956)pp. 702-703, 712-713 et « A propos de la MJtallurgb Nivernaise sous le Second Empire ». Actes du 83e Congrès… (1958)pp. 412-413.

2. Notons encore la fondation, en 1860, d'une société des médecins de la Nièvre, en 1863, d'une société de secours mutuels des instituteurs de la Nièvre.

3. Sur le fonctionnement de la Caisse des ouvriers faïenciers de Nevers, cf. la monographie de E. DE Toytot, Les ouvriers des deux mondes, faïenciers de Nevers… (1886), pp. 177-228 : la famille ouvrière étudiée verse 33,75 F. à la Caisse, mais en reçoit 120,75 F. en argent et en nature.

4. On se représente mal aujourd'hui la véritable révolution psychologique que représente la diffusion des idées de « retraite ». Même pour les fonctionnaires, l'idée était encore mal acceptée au xixe siècle. En 1823, on crée une caisse de retraites des employés de la préfecture de Nevers (les fonds de la caisse alimentée par une retenue de 5 % étaient employés en achats de rente sur l'État). Les ouvriers de l'arsenal de Guérigny jouissaient d'une pension de demi-solde (variant de 96 à 216 F.) au bout de vingt-cinq ans de service ; c'est seulement en 1862 qu'on leur donne de véritables pensions de retraite (variant de 365 à 465 F.). Rappelons que ce sont les ouvriers des arsenaux qui les premiers touchèrent des « suppléments familiaux de traitement » (0,10 F. par jour) qui constituent les premières allocations familiales.

5. En général de 30 F. par mois (cf. DE Toytot, ouvr. cité): or les sociétés commencent à les distribuer immédiatement à certains de leurs adhérents. Les Caisses de secours de Fourchambault ne distribuent pas de retraites aux vieux ouvriers, mais seulement des secours : l'idée de retraite n'était pas encore entrée dans les moeurs. Cependant Paul Benoist d'Azy — futur directeur de Fourchambault — visitant les mines d'Idria en 1846, notait minutieusement tous les détails de la gestion de la « Bruderlade » et notamment les pensions faites aux ouvriers incapables de travailler qui reçoivent demi-paie s'ils ont huit ans de service et paie entière au delà de quarante ans de travail.

1. Almanach du laboureur de la Nièvre pour 1852pp. 49-54. Le maximum de la pension était de 600 F.

2. Ces comités comprennent des fonctionnaires (ingénieurs des Ponts et Chaussées) et des présidents de sociétés de secours mutuels, car ces sociétés pouvaient souscrire des « assurances collectives ». Le maximum de la pension d'invalidité, en cas d'incapacité totale, est très faible.

3. En 1870 l'une des principales revendications des grévistes de Fourchambault était l'administration de la Caisse de secours par les ouvriers eux-mêmes.

4. Le revenu fiscal de la Nièvre est passé de 11 millions en 1820 à 160 en 1860.

5. Contre l'incendie : Soleil, Confiance, Urbaine, Providence, Assurances Générales Province, Iris, Providence agricole, l'Abeille Bourguignonne…

6. On trouve La Paternellequi traite les assurances mutuelles militaires à forfait et La Bonne foi(liée à la Centrale contre l'incendie), «association mutuelle des pères' de famille contre les chances du tirage au sort pour les enfants de tout âge ». L'assurance militaire est très bien entrée dans les moeurs rurales.

7. Le type de « banquier-assureur » serait Achille Jacquinot, qui représente le Phénix: conseiller général, franc-maçon, c'est « le seul banquier de Nevers : cette position lui donne une certaine influence dont il s'est servi dans l'intérêt de son parti : ancien orléaniste, homme assez recevant, il a vivement travaillé pour le général Cavaignac » (lettre du général Petiet, août 1852, A. N. F 1 c III, Nièvre, 5). Assurances et élections sont toujours liées.

8. Le Conseil général avait décidé de ne pas demander la prorogation. Le Soleil reprit la clientèle, embaucha l'ancien directeur de la mutuelle, offrit aux assurés la bâtiments départementaux (soit 150 000 F.).

1. La Providencele Phénix(de Jacquinot), les Assurances généralesrefusèrent de communiquer toute statistique, le travail nécessaire étant fort long et fort dispendieux. Rares étaient les sociétés qui publiaient alors leurs chiffres d'affaires par département — telle La Rouennaisequi, d'après ses comptes rendus, opérait en Nivernais alors qu'elle n'est nulle part signalée : elle garantissait dans le département 6 millions de biens en 1858, 8,3 millions en 1860 et versait 10 à 11 000 F. d'indemnités par an. Notons encore que l'on voit apparaître à Nevers, en 1858, la première société anglaise, la Gresham life assurance societyreprésentée par l'agent de la Providence.

2. Pour l'arrondissement de Nevers seulement.

3. État du 9 mars 1858, A. D. de la Nièvre, X. La Paternelleavait un portefeuille de 4 millions, VVrbaineet la Confiancede 1 500 000 F. La confiance que l'on peut accorder à de tels chiffres est toute relative.

4. La différence tient, pour une part, à la surestimation traditionnelle des biens assurés, mais aussi à l'assurance de granges et écuries non comprises dans l'évaluation du foncier bâti.

5. Nous ne savons pas quelle était la pratique réellement suivie pour estimer le bien détruit (valeur vénale, ou coût de reconstitution ?).

6. Alors président du tribunal de commerce.

1. Au Conseil d'administration figure le directeur de la succursale de la Banque de France, le banquier Bricheteau, le sous-directeur de la Caisse commerciale, plusieurs gros propriétaires.

2. « Nouvelle dans ses statuts, incontestable dans son crédit » ! — Les articles des statuts affirment assez curieusement : la liberté complète de vendre ou d'acheter le bétail sans avoir besoin de prévenir les agents de l'assurance ; la liberté de soigner le bétail suivant ses habitudes sans être tenu, sous peine de résiliation du contrat, d'avoir recours au vétérinaire, parfois impossible à prévenir en temps opportun ; et l'impossibilité de toute fraude « attendu que les adhérents étant à la fois assureurs et assurés sont obligés d'honneur de se contrôler les uns les autres ». I l était prévu que tout propriétaire obligerait par bail son fermier à devenir membre de la société (Statuts de la Société — fondée au capital de 200 000 F . — et liste des fondateurs : A. D. de la Nièvre, U).

3. Fondée au capital de 200.000 F. Le conseil d'administration, très éclectique, comprend le banquier Rabier, un négociant, un éleveur, un marchand de bois, un médecin, un ancien avoué, un propriétaire. Cette société « assure aux actionnaires le privilège d'assurer leurs propriétés à 15 % au-dessous des primes actuelles » et à l'assuré non souscripteur « une réduction de 10 % sur ces mêmes primes ».

4. Sur La Foncièreet le « coup de fouet » donné par elle aux assurances, cf. V. Senes, ouvr. citépp. 356-358.

5. Le rapport entre les sinistrés assurés et ceux non assurés est très variable suivant les années, pour les incendies (en milliers de francs). Assurés Non assurés 1871 214 187 1872 435 90 1873 221 97 1874 738 161 1875 289 200 1876 265 122 1877 197 143

1. La grêle avait causé des pertes de 8,6 millions en 1871, de 2,2 en 1872, de 4,4 en 1875. Mais le petit vigneron s'assurait très rarement.

2. Bulletin de la Société d'Agriculture de la Nièvre1884, p. 162.

3. La prime est de 4 F. par hectare. Or le fermage est de 70 F., les impôts de 15 F., l'intérêt du capital engagé à 4 %, 24 F. et le bénéfice de 45 F.

4. « L'industrie et l'agriculture, déjà si éprouvées par les grèves, les coalitions syndicales, l'aggravation des impôts et la concurrence étrangère n'avaient pas besoin de ce nouveau coup de massue que leur prépare la loi projetée » (Ibid.p. 4). Le projet de loi prévoyait que la charge de la preuve incomberait désormais au patron.

5. Rapport de Benoist d'Azy à la Société d'agriculture (Ibid.pp. 167-169). Il constate la situation misérable du plus grand nombre des ouvriers agricoles « alors que la plupart des industries ont organisé, d'une manière plus ou moins complète, la retraite de leurs ouvriers ». Un versement de 1 F. par semaine de vingt à cinquantecinq ans suffirait pour leur assurer une rente viagère de 600 F. « Quel est le patron agricole qui, pour conserver le concours fidèle d'un bon ouvrier, ne l'aidera pas volontiers, par un supplément de quelques centimes à sa journée, à faire le versement nécessaire ?… » Rien ne sera fait avant la loi de 1910.

1. On assiste à des tentatives d'escroquerie à l'assurance. En 1880, un ancien instituteur fabrique un acte de décès dûment légalisé, une lettre de faire part, deux certificats de médecins pour pouvoir toucher 50 000 F. d'un contrat d'assurance sur la tête de sa mère, qui n'était pas morte.

2. Exposition universelle de 1878… Réponses au questionnaire… par la société anonyme de Commentry-Fourchambault(par Glachant), Nevers, 1878. On y trouvera le tableau des dépenses de la société de secours mutuels des forges de Fourchambault et d'Imphy, qui redistribuait près de 100 000 F.

3. Il est vrai que les ouvriers pouvaient placer leurs économies à 5 % auprès de la société : on trouve aussi placées, en 1877, plus de 2 200 000 F. pour 538 ouvriers.

4. La société prospère de Guérigny est présidée par un ingénieur de la marine, mais « dans les autres sociétés l'emploi des fonds se fait au gré du moment, dans la chaleur des discussions…, l'exploitation par quelques-uns est rendue possible par l'absence de contrôle efficace, … même la voix la plus forte, ou la réflexion la plus pittoresque, l'emportent sur des propositions raisonnables » (F. Gimel, La Nièvre mutualiste, ouv. cité).

5. La moyenne des pensions de retraite, déclare Gimel (ibidem)est inférieure à 50 F. « Cette somme peut-elle être dénommée « retraites » et mérite-t-elle la considération exagérée dont elle est l'objet ? » Un sociétaire qui a cotisé quarante-six ans touche 32 F. à soixante et onze ans : « Les mutualistes ne se rendent pas compte du faible montant qui leur revient à chacun.»

6. Les revendications deviennent purement politiques : ainsi au 1e r mai 1897, les syndicats de Fourchambault déposent à la Marine un cahier de revendications (publié par A. Massé, Le Canton de Pougues1913, pp. 102-103), exigeant la modification de la Caisse des retraites pourqu'il soit possible de donner une pension à tous les ouvriers sans distinction d'emploi, après vingt ans de service sans condition d'âge ; cette pension serait égale aux deux tiers des appointements de la dernière année, et au minimum à 1 200 F. et réversible sur la veuve et les orphelins ou les ascendants ; enfin la caisse serait gérée par les ouvriers, mais uniquement alimentée par des cotisations patronales ! Nous sommes encore loin aujourd'hui d'un tel programme.

7. Cf. Gimel, ouv. citép. 58 et suiv. Les sociétés scolaires de secours mutuels constituées à partir de 1891 devaient assurer aux enfants une retraite pour l'avenir et leur inculquer des idées de prévoyance, d'économie et de solidarité. Une histoire de la diffusion des idées mutualistes — aux origines de la Sécurité Sociale d'aujourd'hui, encore toute imprégnée de mutualité — serait bien nécessaire.

8. Sur « le franc au décès ou protection mutuelle au foyer », cf. Gimel, Ouv. cité. Pour les « Prévoyants de Vavenir» une cotisation de 24 F. par an permettait d'obtenir une retraite de 250 F. à soixante ans.

1. Vaillat, inspecteur de L'etoilerecrute même des agents et sous-agents ; il t n'a pas caché », au dire du préfet très inquiet, « à diverses personnes à qui il demande des concours financiers que ce concours n'avait pas pour seul but une opération commerciale mais qu'il s'agissait, en même temps, d'une association conservatrice sous la présidence de M. le Colonel Piétri », et le maire de Nevers, Signoret, sera admonesté par le Ministre de l'Intérieur pour avoir souscrit des actions de cette compagnie… (A. D. de la Nièvre, M, dossier Signoret, mai 1875). De même la Nivernaisefondée par Lhospied est nettement plus à gauche que La Nièvre.

2. Paris-Assureur1901, pp. 599-600. Les assureurs ne figurent point sur les listes de notables commerçants.

3. D'après des témoignages oraux que nous avons recueillis, socialement on ne les considérait à peu près que comme des voyageurs-représentants de commerce : ils n'avaient nullement le prestige du banquier local. De plus, nombreux étaient les agents étrangers à la province.