Published online by Cambridge University Press: 26 July 2017
Mazarinades : textes écrits et publiés du temps de la Fronde. La naïveté de cette définition n'est pas feinte. C'est bien leur seul point commun, une actualité brûlante mais longue de cinq ans les a produites. Elles n'ont ni le même format, ni le même nombre de pages — de une à 450 —, bien que les circonstances leur imposent un air de famille. Textes vite écrits, vite imprimés, vite lus, auxquels il fallait répondre plus vite encore pour ne perdre ni le fil, ni le filon, c'est-à-dire la clientèle. Elles ne sont même pas toutes simplement frondeuses, mais bien plus souvent demi-frondeuses, ultra-frondeuses, anti-frondeuses. En tout cas, elles furent aussitôt et fébrilement rassemblées par les collectionneurs, à commencer par Naudé pour Mazarin. Ces collections du lendemain sont à l'origine de la plupart des fonds de nos bibliothèques.
This article studies over 400 mazarinades concerning the town or the inhabitants of Bordeaux. The author begins by analyzing the rate of publication of these tracts and the circumstances in which they were produced. As is the case with most militant literature, the publication of the mazarinades was directly linked to the context of events: a mazarinade was in itselfan event. Most of these texts form a network. Some of them are caught in an upward polemical spiral, spilling over from one argument to another in an invariable progression from ideas to men—hence it is important to identify the authors and their sponsors. These investigations reveal the existence of a milieu of frondeurs in Bordeaux whose literary style provides evidence of their political as well as intellectual behavior. Finally, in this perspective, the author examines the argumentative and literary functioning of an ill-defined notion, the “people, “ and the use of historical references, whose effectiveness bears no relation to the vehemence with which they are introduced.
1. Moreau, C., Bibliographie des mazarinades, publiée par la Société de l'Histoire de France, 3 vols, Paris, 1850-1851.Google Scholar Malgré des inexactitudes, c'est un instrument de travail fondamental. Il existe du même auteur un catalogue manuscrit plus complet conservé à la Bibliothèque Mazarine et un supplément imprimé, Bulletin du Bibliophile et du Bibliothécaire, 1982, pp. 786-829. Voir aussi Socard, E., Supplément à la bibliographie des mazarinades, Paris, 1876 Google Scholar, et surtout pour Bordeaux, Labadie, E., Nouveau supplément…, Paris, 1904.Google Scholar Il existe aussi des fonds de mazarinades dans certaines bibliothèques Étrangères : Ph. Hagen, Van Dor, Supplément…, Bulletin du Bibliophile belge, t. XV, 1959, pp. 384–395;Google Scholar Ch. Combs, F. MC., A Check List ofBooks and Pamphlets in the New York Public Library, New York, 1938 Google Scholar; Wnih, Doris W., A Second Check List of French Political Pamphlets, 1560-1653, in the Newberry Library, Chicago, 1955 Google Scholar; Lindsay, R., Mazarinades .a Check List qf Copies in Major Collections in the United States, Madison, 1969.Google Scholar
2. En attendant l'achèvement de la thèse d'Hubert Carrier, on peut lire principalement de lui, « Souvenirs de la Fronde en Urss. Les collections russes de mazarinades », dans Revue historique, juillet-septembre 1974, pp. 27-50 ; «Le mot Fronde, sens et implications», dans Cahiers de Lexicologie, 1968,n° 2,pp. 15-31 ;” Machiavel dans les pamphlets de la Fronde », dans Actes du VIF Congrès de la Société française de Littérature comparée, 1968, pp. 39-46 ;” Port-Royal et la Fronde : deux mazarinades inconnues d'Arnaud d'Andilly », dans Revue d'Histoire littéraire de la France, n° 1, 1975, pp. 1 -25. Une enquête menée au Centre de Recherches Historiques de l'Ehess, sous la direction de Denis Richet est, d'autre part, en cours d'achèvement.
3. E. Birnstibl et Ch. Jouhaud, « Histoire de l'historiographie de l'Ormée », article à paraître. Pauvre en sources, l'histoire de l'Ormée a Été propice aux fictions et fixations idéologiques, jusqu'à une malheureuse thèse récente au titre Évocateur, S. A. Westrich, The Ormée of Bordeaux.- a Révolution During the Fronde, Baltimore-Londres, 1972. Les meilleures mises au point sont Y.-M. Bercé, Histoire des Croquants, Genève, Droz, 1974, t. I, chap. v ; E. Birnstiel, Die Ormée von Bordeaux im Spiegel zeitgenôssischer Publizistik, mémoire de maîtrise de l'université libre de Berlin, dactyl., 1977, et du même, thèse de doctorat à paraître (1982) ; les pages de F. Loirette, dans Ch. Higounet, Histoire de Bordeaux, t. IV, Bordeaux, 1966 et de J.-P. Poussou, dans Histoire de Bordeaux, série Histoire des villes, Toulouse, Privât, 19 80. On pourra aussi se reporter à J. de Cosn AC. Souvenirs du règne de Louis XIV, 8 vols, Paris, 1866-1882, où se trouvent publiés de nombreux documents, et à mes articles, « Geoffroy Gay : une lecture de la Fronde bordelaise », Annales du Midi, 1979, n° 3, pp. 273-295 ; « Bordeaux 1652 : l'Ormée construite par l'opinion. Les représentations politiques d'un Événement », Cahiers de la Civilisation française au XVIIe siècle. Université de Barl
4. J. de Cosnac, op. cit., attribution confirmée par Hubert Carrier qui a eu la gentillesse de me communiquer ce renseignement.
5. En 1642, Guillaume Millanges répond vertement aux jurats qui voulaient soumettre ses productions à leur autorisation préalable. Solennellement convoqué à l'hôtel de ville, il persiste et signe malgré les injonctions des magistrats municipaux qui finissent par céder : « Cependant en mémoire de feu Simon Millanges et des longs services par luy rendus au public, grâce estait faire audit Guillaume Millanges son fils de l'amende qu'il méritait pour les irrévérences par luy commises en paroles et en gestes pendant les interrogatoires qui lui avoient Été faits et en ses réponses » (inventaire sommaire des registres de la jurade, t. VIII, article imprimeurs). Autrement dit, Millanges fait ce qu'il veut, au moins tant que le Parlement n'intervient pas.
6. Correspondance Condé aux archives de Chantilly, année 1651. C'est une source très riche, jusqu'alors peu utilisée.
7. C'est malheureusement le seul document de ce genre aujourd'hui à la disposition des chercheurs, grâce à la publication qui en a Été faite sous la direction d'Henri-Jean Martin.
8. Mémoires de Lenet, Michaud-Poujoulat, t. III, il reste à Bordeaux de mai à octobre 1650, puis de l'été 1651 au mois d'août 1653, en l'absence de Condé, c'est lui qui tient l'essentiel du pouvoir ; il reçoit et expédie une abondante correspondance, il est le centre d'un imposant réseau d'informations.
9. Les titres sont Éloquents : La vaillance mazarine et bernardine, ensemble Le testament de Mazarin et L'esloignement de Bernard ; La séparation de corps et de biens du duc Bernard avec sa Nanon, ensemble les prières et supplications dudit Bernard pour emmener sadite Nanon en Bourgogne ; La réconciliation du duc Bernard d'Espernon avec sa Nanon, par l'intermédiaire du R.-P. Scopette (l'imprimeur serait Pierre Dromadère !) ; La soumission de Bernard à la Fronde, avec ses tristes adieux à la province de Guyenne, et sa consolation sur la dépouille de Nanon ; La rencontre plaisante d'un Bourguignon et du duc Bernard allant en Bourgogne avec sa Nanon…
10. Loirette, Francis, «Une mazarinade en action: le carnaval de Bordeaux», Bulletin et Mémoires de la Société archéologique de Bordeaux, groupe Jules Delpit, III, années 1965-1970, Bordeaux, 1972.Google Scholar
11. C'est un extrait de l'introduction à l'arrêt du Parlement publié après la condamnation du Curé Bourdelois, sans doute de la plume de Geoffroy Gay. Sur Bonnet, Antoine de Lantenay, , Mélanges de biographie et d'histoire, Bordeaux, 1885.Google Scholar
12. On trouve des traces de ces persécutions dans la série G des archives départementales de la Gironde.
13. La mode fait Écrire de véritables « à la manière de… », ainsi la série des rencontres avec un paysan gascon occitanisant, pendant des paysans du nord patoisants, et nul indice d'un renouveau de la langue occitane ! Voir aussi la pochade des frères Perrault, Marc Soriano, « Burlesque et langage populaire de 1647 à 1653. Sur deux poèmes de jeunesse des frères Perrault », dans Annales E.S.C., n°4, 1969.
14. Registre secret de la Cour des Aides de Guyenne, Archives départementales de la Gironde 2 B 11.
15. Les milices bourgeoises sont une institution fondamentale malheureusement fort mal connue. Pour Paris, les recherches de Robert Descimon combleront bientôt ce vide.