L'Evangile de Vérité est sans doute un des textes les plus étudiés de tous les manuscrits coptes découverts près de Nag Hammadi. La somme des travaux publicés depuis près de trente ans ne saurait laisser indifférent. Peu après la découverte parurent une série de présentations visant à faire connaître le texte, puis des traductions, quelques-unes accompagnées d'un commentaire suivi, tentant – jusqu'à un certain point – de rendre compte des difficultés de la version copte. Mais l'intérêt philologique restait toujours au second plan. Ce qui motivait la recherche, c'était les résonances historiques du texte. On procéda selon deux directions: d'une part on rassembla systématiquement tous les parallèles des grands hérésiologues comme Irénée, Tertullien ou Epiphane, ou des textes déjà publicés appartenant au même ensemble copte. D'autre part, on scruta l'histoire antérieure du texte pour aboutir à la conclusion que certaines expressions ou idées appartenaient soit au Nouveau Testament soit à l'un ou l'autre courant philosophique bien connu. Tout ce matériel rassemblé fait apparaître le texte de l' Evangile de Vérité, par delà la difficulté du copte, comme quelque chose de connu, de déjà vu ou entendu. Et pourtant, si l'on entreprend la lecture de l' Evangile, tout versé que l'on soit dans les commentaires, comment n'être pas surpris de se trouver malgré tout dépaysé, avec une impression d'étrangeté que rien, dans l'état actuel de la recherche, ne permet de surmonter?